La Nive nous a offert ces derniers temps une très belle pêche sur certains spots quelque peu en amont de Bayonne et en aval des Saint Jean Pied de Port. Il a fallu négocier avec les orages, nombreux en ce moment. Il a surtout fallu sur un coin secret car très difficile d’accès, subir casses, décroches en combat, hameçons ouverts au ferrage ou lors des sauts, par une poignée de grosses truites de combat, dopées à la testostérone. Une pointe de bas de ligne en 5X m’est même apparue un peu fine ces derniers temps. Une dizaine de casses, décroche sans réussir à passer un de ces poissons dans la raquette. Mais ça c’était avant …
Ce matin, levé 04h30, j’arrive sur site à 05h30 et attends un peu pour cause d’orage peu à peu disparaissant vers le Nord. Une fois atteint le spot précis, une vision me fait oublier mon manque de sommeil. Un poisson est déjà actif. Ses “heads and tails” sporadiques le long de la berge sont autant d’apparitions qui m’électrisent. Je me positionne travers … elle gobine toujours dans la veine d’eau. Trouver la mouche sèche pour la séduire. 10 fois je passerai sur elle sans provoquer de réaction. OK, je suis en 6X, mais fluorocarbone quand même. Je ne vais pas me mettre une pointe en 7X, ce serait la casse assurée. Bref … Même ma fidèle oreille de lièvre la laisse insensible. D’habitude, les farios ne refusent pas cette imitation. Je zappe … Une petite émergente ? Non … un spent de petit sedge ? niet ! un tout petit sedge en canard ? idem … un voilier en cul de canard ? pas plus … une peute alors ? … non, même la peute ne la fait pas monter.
…
Dubitatif, je laisse ma peute négligemment finir sa dérive aval en mode “ski nautique”, “a patinar” comme dirait le Niak. VLLLAAAMMMMM ! une soucoupe sous ma mouche, elle vient d’être gobée. Miracle, l’hameçon est toujours piqué dans la gueule du leviathan, ma pointe n’a pas cassé, la jonction nylon/tissé non plus, et le poisson ne s’est pas décroché …
Les mouches auraient-elles changé d’âne ?
Elle me gratifiera d’un superbe combat tout en puissance, en mode bonefish, elle me mettra deux fois sur le backing, fera plusieurs chandelles, et au bout de peut-être 4 ou 5 minute obstinées, se rendra à l’épuisette. Une petite déception m’envahit : ce n’est pas la fario rêvée, mais une “vulgaire” truite arc en ciel. Vulgaire, mais avec un gaz !! Rien à voir avec le combat d’une fario. Un poisson beaucoup plus électrique, plus violent. Une autre satisfaction quand même : c’est un beau poisson, bien conformé, avec des nageoires plutôt pas mal, une belle robe : un poisson sauvaginé, un poisson en marronnage comme on dirait à la Réunion. Peut être pas une conformation aux standards “grosse arc” de la Henry’s fork dans l’Idaho, mais un poisson qui m’a donné du fil à retordre, avant et pendant, et donc beaucoup de plaisir. Une truite arc-en-ciel de 51 cm. Merci ma Nive !
Je ferai une autre arc ce matin-là (moi qui n’en pêche jamais !), 4 farios classiques, en décrocherai 2 autres, na casserai pas une fois, et finirai une honorable fario de 44 cm. Celle-ci gobinait collée sur la berge d’en face, sous les frondaisons. La profondeur n’empêchant de me rapprocher, seule possibilité : double-traction et posé en tas du bas de ligne dans une trouée de la frondaison en amont du poisson, en laissant ensuite ce bas de ligne dériver et, à la faveur du courant, rejoindre ce bec gourmand plus en aval, sous les branches tombantes. Bref … pas simple.
Je bataillerai longtemps avant de réussir un premier bon posé. Un premier posé réussi qui occasionnera à mon grand dam, un refus sur une shuttlecock. Refus du à cette mouche bizarre, une pointe trop grosse -je suis repassé en 5X- ou un dragage invisible depuis là ou je suis ? Je préfère assurer et passer à une oreille de lièvre, cette dernière, étant certainement très motivée car surement frustrée par son début de matinée marqué par l’échec. La frustration est souvent une motivation supplémentaire. Rien ne vaut un joueur revanchard….Un quart d’heure plus tard, le bras en compote (wading très profond+double traction), et après m’être bien concentré, je repose mon bas de ligne dans la trouée. Dérive de 2 mètres vers l’aval, et la mèche de poil de lièvre est aspirée par un bec en pleine confiance. Ferrage bien dans le tempo. Elle est pendue. Après un combat bien moins athlétique qu’avec l’arc de début de matinée, cette belle panthère de la Nive se rendra. Photo, bisous et relâche.
Je pêche depuis plusieurs heures, il est temps de rentrer sur Bayonne, je suis hhhhaché par la fatigue et l’hypoglycémie. Une bien belle partie de pêche qui me fait voir le coup du matin d’un autre œil, moi qui suis a priori un inconditionnel du coup du soir. Dors bien Fred …..