Pour faire suite aux commentaires de Ransot sur le post précédent :
je t’avoue que même si les meilleurs scores en nymphe ou noyée ne prèchent pas pour la sèche, je viens de persévérer durant un mois dans une Grande Nive vide, une piscine !
Vivant à Bayonne, j’aurai eu les même résultats en allant à la piscine de Lauga, ou au milieu du pré, au stade Jean Dauger ! Et pourtant, j’ai continué depuis un mois en sèche, dans une Nive morte. Je suis coutumier de cette persévérance illusoire. Mais pourquoi ?
L’école de la surfaçologie
Enbrigadé par par la lecture des bouquins de Duborgel j’ai découvert depuis tout petit la pêche aux leurres de surface.
Déjà , Michel Duborgel, dans sa bible de la pêche en eau douce (seul bouquin de pêche indispensable, aucune photo, du pur bonheur -les ultra-FONDAMENTAUX de la pêche à la truite, au saumon, brochet, black-bass, chevesne – …) relatait sa méthode de pêche du black bass avec des grenouilles artificielles, ou un rapala flottant utilisé comme un poppers en “stop & go” (c’est vrai que maintenant, un anglicisme est préconisé pour chaque technique de pêche spotrtive, histoire de faire moderne). On lance, le leurre tombe sur l’eau dans un trou de nénuphars. On ne touche à rien, en attente du gobage de black qui peut intervenir pendant que les ronds dans l’eau se dissipent alentour. Un coup sec du scion. Le rapala (5 ou 7 cm à l’époque, coloris perche) plonge et remonte desuite. On stoppe. Les ronds battent le rappel. Coup de scion … et ainsi de suite. L’attaque d’un black sur le leurre que tu fixes comme un cobra fixe le rat est transcendante.
Plus tard, ce sont des loups aux Baléares, des louvines à Guethary et aux piles d’assiettes entre St Jean et Hendaye qui attaqueront mes mirrolurres à hélice. Les années 90 arrivant, quelques leurres américains commencent à se démocratiser.
L’étape LUCKY CRAFT
Lucky Craft m’apporta vers 1992 le SAMMY qui hypnotisa mes parties de pêche quasi-quotidiennes durant 8 ans à la Réunion : dorades coryphènes, carangues “zailes bleues”, queenfish, thons dents de chien, bonites, aiguilles becs courts. Il devenait de plus en plus inconcevable de pêcher sous l’eau. L’attaque d’un prédateur tropical sur un leurre chien-chien zig-zaguant à la surface me rend fou. Je soupçonne que je rejoindrai St Pierre (St Pierre évidemment, …, oh qué Mambo !! …) sur arrêt cardiaque lors de l’attaque de mon popper ou stick-bait par un carnassier justicier-vengeur. La pêche de surface est celle qui m’hypnotise le plus. Pour preuve, résumé de mes 3 semaines de pêche à la louvine (bar), cet été :
2007 – Morbilhan : bredouille à tous les étages !
Comme tous les étés donc, 3 semaines dans le Morbilhan. Carnac, la Trinité, l’Ile aux moines. La mecque du bar aux leurres de surface. J’y cartonne tous les étés avec, on va dire, une moyenne de 2 poissons par partie (je ne garde pas en dessous de 40/42 cm). Autre indicateur : une moyenne d’une dizaine d’attaques, remous par partie. Il faut dire que le secteur regorge de coins fabuleux; Mention spéciale au golfe du morbilhan, avec des coins cumulants eau claire+bancs de goémond+roche+sable+courant+faible profondeur+ ……. parcs à huitre ! Le summum donc. Ne péchant que du bord, je me régale à gratter ces coins à haut potentiel. Petit lancer, tresse 13/100e, bas de ligne fluorocarbone 50 ou 60/100e, stick bait walking the dog (type Sammy). ça, c’est d’habitude ! Cette année : 30 parties environ, … 26 bredouilles, mais pas n’importe lesquelles, des vraies, des pures, des intégrales, des essentielles, des complètes, des intègres, des parfaites, entières, sans faille, des bredouilles ultimes : pas une attaque, pas un remous… le désert. 4 parties avec poisson (dont 3 sur l’Ile aux moines). Un record avec un bar de 63 cm au lancer, et globalement que du gros de plus de 50, tout sur l’Ile aux moines, pointe du Trech. L’ami Jean-Pierre CASTALDI, s’en souvient encore, son A/R en zodiac depuis Belle-Ile par force 4/5, tout ça pour déguster un bar, en vallait bien le coup. Bref. A part ces quelkques parties anecdotiques, une saison de merde ! Et pourtant, et c’est là où je veux en venir depuis 2 paragraphes, jusqu’au dernier lancer de la dernière partie de cette série de 30 parties, j’étais encore hypnotisé par mon Sammy traversant un courant d’eau claire et oxygénée, courant sur un parc à huitre dans 1 ou 2 m d’eau. La pêche de surface qu’elle soit traine rapide au marlin, pêche aux leurres de surface des carangues, des bars, ou pêche de la truite en sèche (ça y est, je boucle mon développement) est transcendante. Je ne peux me faire à la pêche aux leurres souples, aux poissons nageurs travaillant sous l’eau, à la pêche à la nymphe ou à la noyée. Je me déconcentre rapidement et pêche machinalement, sans grand intérêt.
Je préfère donc une bredouille en sèche que du poisson en noyée !
Quand même pas, mais je fais tout comme.
La seule pêche “sous l’eau” de carnassiers qui me rend fou, c’est la plus viscérale, la plus hemingwayienne, la plus essentielle : le marlin à la bonite vivante avec la délicatesse … de tenir la ligne à la main, comme à la palangrotte. Je dois être un des rares à flipper pour ces sensations, mais bon, ce sont pour moi les sensations les plus ultimes (surtout du fait de la taille et de la qualité du poisson, plutôt que de la technique “sous l’eau”).
Des actions de pêche que je souhaite à tout pêcheur de vivre.
La dorade coryphène au leurre de surface
En écrivant ces lignes, je me remémore une arrivée sur DCP (Dispositif Concentrateur de poissons), au large de la Réunion. Joël Leguen, mon grand copain pêcheur -entre autres- et skipper de grande pêche à la barre.
Façon Di Caprio “je suis le roi du Monde”, j’occupe la proue du bateau de Jojo, mon lancer en main, un gros popper fait maison au bout (initialement un lancer pour le bar, mais rafistolé pour la dorade coryphène et le thon). Et à chaque lancer du poppers, le banc de dorade, les mles en premier, se jette sur le leurre.
Des actions de pêche que je souhaite à tout pêcheur de vivre. Même si en l’espèce, les dorades se piquent souvent, mais restent rarement sur le zinc, ce sont des souvenirs rares. En partie du, je pense, à la vue de l’action de jeu . Vous n’aurez pas le même tension hypnotique avec une pêche au jig. Entre nous, Jojo étant professionnel et trimballant des touristes-pécheurs à la traine en même temps que ma vielle carne à la proue, mes gags de surface ayant la nette tendance à faire fuir le banc de dorades du DCP au bout de 3 ou 4 piercing, j’ai vite arrété de plugger sur le bateau de Jojo en présence de touristes “payants”. Chiffre d’affaires oblige (la dorade se vend très bien, et très cher et à la traine, ou à l’appat, on décroche moins qu’au plugging).
Bien sûr que vous aurez plein de contre-exemples; Moi-même, mes plus gros poissons péchés (marlin 242 kg, requin tigre de 3m, thon dent de chien de 72 kg .. le furent au fond, souvent à la bonite vivante).
Mais rien à voir avec le marlin qui vient attaquer les teasers, puis un leurre, un autre, sous nos yeux ébahis, avant de gober le plus gros, au cul du bateau, à 4 mètres de nous.
Revenons à la pêche à la mouche … sèche
Rien à voir non plus avec la grosse fario de cet été qui gobe 2 fois sur un pool de la Don en Ecosse, montrant successivement son museau, sa dorsale et sa caudale, avant de gober une dernière fois votre émergente de sedge qui dérive à la surface, sous votre regard, que dis-je sous votre concentration apnéique ! Tout ça à la surface. Sous vos yeux. La pêche en surface est magique. Je suis hanté par la surface et les mystères qu’elle nous cache. Et au milieu flotte ma mouche…